Utilisé depuis plus de 4 000 ans en médecine traditionnelle chinoise, l'Éleuthérocoque intéresse la communauté scientifique depuis le XXe siècle suite, notamment, à des études réalisées en Russie. Classé parmi les plantes adaptogènes, on lui attribue aussi le nom de « Ginseng de Sibérie » ou de « Racine de la taïga ». De nombreuses recherches ont en effet permis de montrer que l’Éleuthérocoque avait la capacité d’aider l'organisme à s'adapter en cas de stress, de fatigue ou d’effort physique intense. Certaines de ses propriétés seraient dues à son action au niveau des surrénales, des glandes qui produisent entre autres l’adrénaline et le cortisol qui sont au cœur de la réponse de l’organisme face au stress. L’Éleuthérocoque serait même capable de moduler cette action en fonction de l’intensité et de la durée du stress.

Cet article a été mis à jour le 20/06/2024

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Un effet cortisone-like en cas de stress aigu ou ponctuel

Situées juste au-dessus des reins, les surrénales sont les glandes qui produisent notamment certaines hormones clé du stress. Au début d’un épisode de stress, en phase d’alarme, ce sont les médullosurrénales qui vont d’abord sécréter de l'adrénaline et de la noradrénaline. Ce sont ces molécules qui sont responsables des réactions caractéristiques du stress aigu : accroissement de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle et du taux de sucre, accélération de la respiration, dilatation des pupilles, sueur, mains moites et douleurs abdominales. Leur rôle principal est de donner à l’organisme les moyens de fuir ou d’affronter le danger, source de stress. L’Eleuthérocoque ne semble pas intervenir dans cette toute première étape du stress aigu.

Si le stress se prolonge, ce sont les corticosurrénales qui vont prendre le relai. La production de cortisol est prévue pour permettre de tenir le plus longtemps possible. C’est ce qu’on appelle la phase de résistance. Quand le stress s’arrête, l’organisme a ensuite la capacité de revenir à l’équilibre (phase de récupération). C’est pourquoi le stress est défini comme une réaction d’adaptation naturelle face à une situation perçue comme un danger. Une aptitude essentielle et nécessaire pour la survie de tout être vivant ! Cette belle mécanique se complique quand les situations de stress dépassent les capacités de l’organisme à s’adapter parce que le stress dure trop longtemps.

C’est alors tout l’intérêt des plantes adaptogènes comme l’Eleuthérocoque qui, en agissant sur la production de cortisol, vont aider l’organisme à résister plus longtemps. Plusieurs études ont permis de mettre en évidence ses effets « cortisone-like » en cas de stress. Les données d'un essai clinique montrent effectivement que le taux de cortisol est augmenté de 31 % chez des athlètes de haut niveau qui ont reçu quotidiennement 4g d'un extrait racinaire alcoolique d'Éleuthérocoque pendant six semaines, versus un placebo. Ces résultats confirment ceux déjà obtenus in vivo sur des animaux dans le test de la nage forcée qui est un des tests de référence pour mesurer la capacité d’une plante ou d’une substance à augmenter la durée d’un effort physique, comme en cas de stress aigu. Par ailleurs, il existe peu d’informations concernant une action de l’Eleuthérocoque sur les autres hormones produites par les corticosurrénales : aldostérone, androgènes, œstrogènes.

Une action régulatrice en cas de stress chronique

Quand le stress perdure et devient chronique, les surrénales vont continuer à produire du cortisol à des niveaux élevés avec de multiples conséquences sur la santé : baisse de l’immunité, hypertension et maladies cardio-vasculaires, anxiété et insomnie, angoisse et dépression jusqu’à ce que les surrénales s’épuisent et que la production de cortisol s’effondre. C’est alors ce qu’on appelle le burn out.

En cas de stress chronique, l'Éleuthérocoque présente aussi un intérêt majeur. Il semble en effet s’adapter à cette situation par un effet contraire en réduisant la production de cortisol. Ce phénomène s'explique par une action indirecte sur les glandes surrénales : les composés de la plante se lient aux récepteurs de l'hormone dans le cerveau, déclenchant un rétrocontrôle négatif qui inhibe la production hormonale au niveau des glandes surrénales. Cette action régulatrice au niveau des surrénales semble aussi concerner les autres neuromédiateurs du stress comme l’adrénaline et la noradrénaline, ainsi que la sérotonine et la dopamine au niveau du système nerveux central.

Ces observations indiquent que l'Éleuthérocoque a la capacité de moduler l'activité des glandes surrénales de manière directe et indirecte. Il permettrait ainsi de limiter les effets délétères d’une hyperproduction de cortisol et d’éviter les risques d’épuisement. Les mécanismes en jeu sont assez complexes et des recherches supplémentaires sont encore nécessaires, mais ces informations confirment bien que l’Éleuthérocoque est une plante adaptogène majeure, notamment par son action au niveau des surrénales qui s’adapte en fonction du niveau de stress.

Comment l’utiliser ?

En tant que plante adaptogène, l’Éleuthérocoque est indiqué pour prévenir d’un risque d’épuisement en cas de stress chronique, mais aussi en cas de fatigue physique ou intellectuelle, de baisse de concentration, de convalescence ou en préparation d’une épreuve sportive. Il existe par ailleurs d’autres méthodes alternatives ou complémentaires pour aider à gérer le stress avec des solutions naturelles.
Pour profiter des bienfaits de l’Éleuthérocoque, il est préférable de :

  • faire une cure de trois semaines maximum, suivie d’une pause d'au moins une semaine, avant de refaire une cure si besoin.
  • ne pas en prendre pendant plus de deux-trois mois maximum.

En tisane

En herboristerie, le terme "tisane" désigne une boisson réalisée par le mélange d'eau et d'une ou plusieurs plantes en mélange. Pour préparer une tisane, on emploie généralement l'une des trois méthodes suivantes : l’infusion, la décoction ou la macération. L’Éleuthérocoque étant une racine, ce sont la décoction de racine séchée ou l’infusion à base de poudre qui sont privilégiées.

  • En décoction : faire bouillir la quantité de racine séchée indiquée sur le produit pendant 15 à 20 minutes. À consommer au cours de la journée.
  • En infusion : mettre 2 à 4 grammes de poudre de racines séchées dans une grande tasse d’eau chaude. Laisser infuser une dizaine de minutes puis filtrer. À prendre une à deux fois par jour.

En poudre

Les poudres sont idéales pour des plantes riches en fibres comme la racine d’Éleuthérocoque. Cette forme assure une absorption optimale au niveau intestinal. Cependant, les poudres sont généralement moins stables que les plantes entières et ne se conservent pas bien sur le long terme.

Conseils d’utilisation : les poudres peuvent s’utiliser en infusion, être ajoutée à des aliments ou des boissons (chaudes ou froides) en respectant les dosages indiqués sur le produit.

En teinture mère

Dans le vocabulaire courant, on désigne par "teinture mère" un extrait hydroalcoolique résultant de la macération de plantes dans un mélange d'eau et d'alcool. Cette méthode permet d'extraire les composants actifs solubles dans ces solvants à partir de la plante entière ou de parties spécifiques comme les feuilles, les fleurs, les graines, les écorces, les fruits ou encore les racines comme pour la teinture mère d’Éleuthérocoque.

  • Conseils d’utilisation : la posologie varie selon la concentration en alcool et la quantité de plante présente dans la teinture mère. Il est essentiel de suivre les instructions spécifiques sur l'emballage du produit et de ne pas dépasser les doses recommandées.
  • Populations à risques : en raison de l'alcool dans leur composition, les teintures mères ne conviennent pas à certaines personnes, notamment les femmes enceintes ou allaitantes, ainsi que les jeunes enfants.

Précautions d’emploi

La littérature au sujet de l'Éleuthérocoque ne mentionne pas de toxicité particulière. Il convient cependant de respecter certaines précautions d’emploi :

  • Effets indésirables : à forte dose, l’Éleuthérocoque peut causer des effets indésirables tels que des maux de tête, des insomnies, de l’irritabilité ou des palpitations.
  • Interactions médicamenteuses : selon les connaissances actuelles, il est recommandé d'éviter de combiner l’Éleuthérocoque avec certains médicaments, notamment les anticoagulants, les hypoglycémiants, les traitements hypo ou hypertenseurs, et ceux qui sont métabolisés par les CYP2C9 et CYP2E1.
  • Populations à risques : par mesure de précaution, l'utilisation de l’Éleuthérocoque durant la grossesse et l'allaitement est déconseillée. L’Agence européenne du médicament (EMA) recommande pour les même raisons d’en réserver l’usage aux adultes et aux enfants de plus de 12 ans. Il est également préférable de l’éviter pour les personnes ayant une tension artérielle élevée.
  • Durée d’utilisation : afin de ne pas stimuler trop longtemps les capacités d’adaptation de l’organisme, il est conseillé de ne pas prendre d’Éleuthérocoque en continu et de bien respecter les « pauses thérapeutiques » (une semaine d’arrêt après 3 semaines de prise) en se limitant au total à 2-3 mois maximum.

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Bibliographie

Publication : Gaffney, B. T., Hügel, H., & Rich, P. (2001). The effects of Eleutherococcus senticosus and Panax ginseng on steroidal hormone indices of stress and lymphocyte subset numbers in endurance athletes. Life Sciences, 70(4), 431–442. https://doi.org/10.1016/s0024-3205(01)01394-7

Publication : [4] Yan-Lin, S., Lin-De, L., & Soon-Kwan, H. (2011). Eleutherococcus senticosus as a crude medicine: Review of biological and pharmacological effects. Journal of Medicinal Plants Research, 5(25), 5946-5952

Publication : Gaffney, B., Hügel, H., & Rich, P. (2001). Panax ginseng and Eleutherococcus senticosus may exaggerate an already existing biphasic response to stress via inhibition of enzymes which limit the binding of stress hormones to their receptors. Medical Hypotheses, 56(5), 567‑572. https://doi.org/10.1054/mehy.2000.1163

Ouvrage : Fleurentin, J., Pelt, J. M., & Hayon, J. C. (2016). Du bon usage des plantes qui soignent. Rennes, France: Ouest-France.

Ouvrage : Lorrain, É. (2019). Grand Manuel de phytothérapie. Dunod.

Site Web : WikiPhyto, l’encyclopédie de la phytothérapie. (s. d.). à l’adresse http://www.wikiphyto.org/wiki/Accueil